Antoine Drocco
Données personnelles
- Dates d'existence: 1896-1942
- Lieu de naissance: ?
Parcours professionnel et biographie
Antoine Drocco effectue son apprentissage en à l’imprimerie de la Tribune de Genève et adhère immédiatement après au syndicat.
Il prend la présidence de la section genevoise en 1922 suite à la démission de Gustave Noverraz. Ce changement de présidence est significatif de la liquidation de la tendance syndicaliste révolutionnaire au sein de la FST nouvellement unifiée (1917). Noverraz ( ?-1926) est parmi les syndicalistes révolutionnaires qui ont suivi Louis Bertoni dans la création d’un syndicat dissident, le Groupe typographique romande (GTR), en 1913 à la suite du long mouvement de boycott de la Tribune de Genève organisé par la Fédération des unions ouvrières de Suisse romande (FUOSR). En 1922, les membres du GTR rentrent dans la FST et Noverraz est élu président de la section genevois. Une grève a lieu en Suisse romande à la fin de l’année 1922 qui met un terme à l’expérience de la Communauté professionnelle (1917-1923). Pour Jean Möri, il fallait, à la suite de cette grève « une main sûre pour gouverner » la section « et ce fut celle de Drocco ».
À sa prise de présidence en 1922, il est inscrit sur une liste noire patronale et ne peut plus travailler à Genève. Il abandonne donc la présidence et part à Berne, puis en France. Il revient en 1927 « lorsque l’Imprimerie populaire [de Genève], installant les machines de sa spécialité, put l’accueillir parmi son personnel. » À la retraite d’Alexandre Dufaux ( ?-1939) député au Grand Conseil genevois, secrétaire USCG, membre fondateur et président central de la Fédération suisse des employés des douanes), il obtient le poste de secrétaire permanent de l’Union des syndicats du canton de Genève (USCG). En mai 1940, l’USCG est dissoute par une décision de l’Union syndicale suisse pour contrer l’influence communiste au sein de l’organe, mais Drocco est maintenu à son poste de secrétaire et participe à la constitution de la Chambre du travail de Genève (26 décembre 1941).
Député socialiste au Grand Conseil de 1930 à 1933 et de 1939 à son décès, Drocco fait partie de la tendance Rosselet, puis du Parti socialiste de Genève fondé par ce dernier, section reconnue du PS suisse opposée au PS genevois de Léon Nicole. Il était également membre du Conseil d’administration et du comité directeur de la Société coopérative suisse de consommation, ce qui fait écrire à Charles Rosselet qu’« il était ainsi le militant complet tel qu’on le concevait autrefois », c’est-à-dire qu’il prenait part aux trois piliers traditionnels du mouvement ouvrier : parti, syndicat et coopérative.
La mémoire de Drocco est saluée par trois nécrologies, l’une sous la signature de Jean Möri dans Le Gutenberg, l’autre sous la signature de Charles Rosselet dans La Sentinelle et la troisième signée Marius Maillard dans La lutte syndicale. Outre les passages déjà cités du texte de Rosselet, il faut souligner que les trois articles louent sa grande culture ouvrière : « Antoine Drocco était un homme cultivé, toujours empressé d’élargir ses connaissances générales ». L’article de Möri, publié en première page du Gutenberg et augmenté d’une image du défunt (honneurs habituellement réservées aux membres du Comité central), est l’occasion d’une charge virulente contre les communistes à mots à peine couverts :
Il lutta non seulement contre la rouille communiste, mais encore contre des amis ingrats qui ne lui ménagèrent pas les coups de sabots les plus inattendus. […] Au crématoire, quatre orateurs évoquèrent tour à tour le député, le syndicaliste, le socialiste, le coopérateur. Et je revoyais l’image persistante d’Antoine, les mains dans les poches, un sourire cordial aux lèvres. Mais l’image désabusée du syndicaliste incompris vint raviver ensuite mon amertume […] Le chef a trouvé le repos.
Ces lignes de Möri sont représentatives d’un état d’esprit qui règne au sein de la tendance social-démocrate de la Fédération – et plus largement dans les grandes centrales syndicales – au moins jusque dans les années 1970. En dépit d’une hégémonie de plus en plus évidente et de plus en plus marquée, les leaders de cette tendance se représentent en victimes et en « syndicalistes incompris ».
Drocco aurait probablement été candidat à la succession de Jean Möri au moment de la nomination de celui-ci au secrétariat de l'Union syndicale suisse en 1946.
Sources
- Gianpiero Bottinelli, Louis Bertoni : une figure de l’anarchisme ouvrier à Genève, Entremonde, p. 64.
- Procès-verbal d’assemblée générale de la section genevoise, 30 juin 1922, Archives FST-GE, armoire du bureau.
- Jean Möri, « Hommage à un homme : Antoine Drocco », Le Gutenberg, 9 octobre 1942.
- Charles Rosselet, « Antoine Drocco », La Sentinelle, 30 septembre 1942.